Friday, June 22, 2018

SR. JACQUELINE PICARD (OTTAWA, CANADA)

SR. JACQUELINE PICARD (OTTAWA, CANADA)


En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux où tu as été envoyée ?  

Quand j’étais encore jeune professe, mon travail était surtout dans les collèges secondaires ou j’enseignais mon sujet préféré les mathématiques ! J’aimais beaucoup mes élèves , et je pense qu’ils le sentaient . Vu que j’avais appris la langue locale, ceci me permettait d’être proche et de visiter leur famille quand c’était possible. Un jour quelques-uns de mes élèves vinrent me demander : Pourquoi vous venez  vivre et travailler ici ? Pourquoi vous avez quitté votre beau pays pour venir enseigner ici ? Nous, notre seul désir est d’aller vivre au Canada… Une telle question m’a réjoui le cœur , j’ai compris qu’ils avaient vu , sans se l’avouer le motif profond qui me permettait de vivre heureuse dans ma mission . 

Après j’ai fait l’animation vocationnelle dans plusieurs pays : au Canada, en Italie et au Ghana ; j’ai senti que Dieu se sert de nous pour éveiller les vocations  par notre parole , notre exemple, notre  joie de vivre, mais c’est toujours l’Esprit qui fait le reste , qui brûle le coeur de celui ou celle qu’il appel . 

Beaucoup plus tard,  quand j’ai travaillé avec les femmes de la rue , je sentais que nous pouvions communiquer en profondeur , elles sentaient que je les aimais beaucoup et que tout ce que je désirais était de les rendre heureuse ! En résumé, c’est l’amour qui fait qu’on est apôtre !

De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ? Peux-tu l’expliquer ? 

Jeune fille, j’ai enseigné à Montréal pendant 4 ans avant de me décider à suivre mon appel missionnaire. Le jour où j’ai tout quitté pour partir au postulat , ce fut un choc dans ma famille et dans mon milieu de travail , pour les professeurs et pour mes élèves . On m’a beaucoup interpelée , on me  demandait pourquoi je quittais et qu’est-ce que je deviendrais . Le Québec est de plus en plus matérialiste et déchristianisé donc un tel départ est étrange aux yeux de plusieurs personnes. On s’imagine difficilement qu’on peut vivre toute une vie heureuse pour suivre le Christ. J’allais définitivement contre le courant de la vie normale . 

Qu’est-ce qui te vient à l’esprit, quand tu penses à ton expérience de vie communautaire internationale et interculturelle ? 

C’est une vie très riche et très agréable . Nous avons de la chance de vivre dans une congrégation telle que la nôtre ou on est forcées de s’ouvrir continuellement à l’autre , à accepter différentes façons de faire.  C’est une vie  qui nous fait grandir et devenir tolérantes , une vie qui nous pousse à accepter avec patience les incompréhensions et qui nous pousse vers le pardon et l’humilité . On doit apprendre à écouter avec son cœur . C’est une vie qui nous invite à un amour universel

Avec les années, les défis s’accumulent.  Défis  qui pour moi n’étaient pas dû à l’internationalité ou l’interculturalité mais bien à nos difficultés de caractères , à  la fatigue , à la température, la maladie, à trop de travail, à un mauvais  d’équilibre de vie .  Tout ça  ronge nos énergie et les conflits peuvent nous rendre malheureuses . J’ai quelques fois vécu dans les communautés difficiles ou mon seul recours était Celui à qui j’avais donné ma vie . Il était mon refuge , ma force , ma source de courage . Même si des fois je souffrais de certains conflits , il y avait toujours la paix au plus profond de moi . IL y avait écrit sur le mur de ma chambre : ‘’Les montagnes peuvent s’en aller , et les collines s’abaisser, mais mon amour pour toi ne s’en ira pas ‘’(Isaie54,10)

Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, encore à l’étape des vœux temporaires ? 

Ayez confiance en Celui qui vous a appelé quelque soient les difficultés. ‘’Il est toujours avec nous jusqu’à la fin des temps ‘’ comme Il nous l’a promis.


Interviewée par Sr Faustina  Baawobr
Kinshasa Yolo, RDC 

Saturday, June 9, 2018

SR ANDRÉE BOUCHARD (MONTRÉAL, CARTIERVILLE CARREFOUR)

SR ANDRÉE BOUCHARD
MONTRÉAL, CARTIERVILLE CARREFOUR 

Sr Pascaline Katungu Muleresimundu : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux où tu as été envoyée ?   

Sr Andrée : Jésus a été le premier apôtre, apôtre du Père, par son oui en venant nous annoncer l’amour de Dieu pour l’humanité. Il l’a annoncé par ses paroles et par ses actions.
Je me souviens que ma mère était bonne pour les malades : pour ses enfants, quand nous étions malades. Et je me souviens qu’un été, nous avions accueilli durant deux mois à notre chalet une grande tante à elle, âgée et très malade. C’était vécu avec amour.
A mon jeune âge, a grandi en moi le désir de la vie religieuse, puis de la vie missionnaire. Voulant être au service des malades, j’ai pu faire mon cours d’infirmière après mon noviciat. J’ai travaillé 35 ans en Afrique dans les services de santé. Dès ma première nomination, on m’a demandé d’aller dans un service d’ophtalmologie à Nouna au Burkina-Faso. La Parole de Dieu en Luc 4,18 me parle beaucoup : « … proclamer aux aveugles le retour à la vue ». Aujourd’hui, Jésus passe encore en faisant le bien par notre intermédiaire.
En Afrique, j’ai vécu 27 ans en ophtalmologie, et 8 ans dans des dispensaires où tous les malades étaient accueillis. Au Canada, ma vie missionnaire continue auprès de nos sœurs malades.
Un beau souvenir : un jour, à Nouna, une maman aveugle qui avait 34 ans est venue nous consulter. Elle avait un enfant de deux ans qu’elle n’avait jamais vu. Comme son problème était des cataractes, nous l’avons opérée, et le lendemain, en enlevant son pansement, elle voyait son enfant pour la première fois. Quelle joie pour elle et pour nous !

Pascaline : De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ? Peux-tu l’expliquer ?

Andrée : En 1999, à Wamaza, au Congo, durant la guerre, nous avons choisi de ne pas quitter à cause du danger, mais de rester avec cette population souffrante, jusqu’à ce soit les militaires qui nous disent de partir : nous n’avions pas le choix ; le bon sens nous disait qu’il ne fallait pas résister.
Pascaline : Qu’est-ce qui te vient à l’esprit, quand tu penses à ton expérience de vie communautaire internationale et interculturelle ? 

Andrée : Je crois que j’ai une bonne facilité d’adaptation. En Afrique, c’était plutôt une joie pour moi de vivre cela dès ma première année, et tout le temps en Afrique, et en Europe lors des sessions. Une belle parole de saint Paul me tient à cœur : « Il n’y a plus ni juifs ni grecs…vous êtes tous uns en Jésus » (Galates,3,28). Laissons-nous conduire par l’Esprit pour la vivre.
Pascaline : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, encore à l’étape des vœux temporaires ? 

Andrée : Quand votre vocation a été bien discernée, faites confiance en Celui qui vous appelle. Chaque jour viendra la grâce nécessaire pour répondre à l’appel quotidien. Vivez dans l’action de grâces d’avoir reçu cet appel en restant humble, car nous resterons toujours des êtres fragiles. Que la prière soit très importante pour vous. Nos vœux existent pour nous aider à vivre cet engagement spécial à la suite du Christ. Vivons dans l’espérance : Il est fidèle celui qui nous appelle. Bonne route à chacune de vous et fructueuse session ! 

Interviewée par Sr Pascaline Katungu Muleresimundu

Kinshasa Yolo, R. D. CONGO    

SR GLORIA MARTINEZ GIL (LOGROÑO, ESPAGNE)


SR GLORIA MARTINEZ GILLOGROÑO, ESPAGNE


Victorine : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux où tu as été envoyée ?           

Gloria : J’ai passé une grande partie de ma mission en Algérie, un pays presque 100% musulman. J’ai travaillé comme infirmière, avec un contrat étranger et un diplôme espagnol, car au début de mon service, le pays n’avait pas encore d’infirmière, et cette période fut l’année de l’Indépendance (1961 - I962). J’ai fait 12 ans dans la communauté d’El Goléa en plein désert, où j’étais responsable de la pédiatrie. Dans ma profession d’infirmière, j’étais heureuse de soigner  ce  peuple qui m’a  accueillie avec joie et amour et dans l’ouverture  de vivre et de partager la  culture islamique,  et dans  l’accueil de  la  religion de l’autre, différente de la mienne. J’avais un amour passionné de mon métier d’infirmière et j’apportais consolation aux malades. Mon témoignage de la vie du Christ était le désir du travail bien fait, l’accueil de chaque personne et le dialogue. Ma façon de partager ma foi s’appliquait par ma simple disponibilité, mon attention portée à chacun dans mes heures libres à l’hôpital. A Djelfa, j’ai été très marquée par l’accueil du peuple, et c’est de là que j’ai commencé à apprendre l’arabe. J’ai vécu dans la joie et la disponibilité mon service comme conseillère provinciale dans la Congrégation pendant 9 ans, puis mon service comme accompagnatrice de jeunes professes. Comme infirmière à Alger, j’étais appréciée par le responsable de l’hôpital, et chaque fois, il m’invitait à participer à la formation qu’il donnait aux stagiaires. 

Victorine : De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ? Peux-tu l’expliquer ?

Gloria : L’action prophétique dont je me souviens est celle de la rencontre d’une femme qui était sur le point de mourir d’un cancer á l’hôpital. Elle ne m’a pas trouvée un matin, et à mon arrivée, elle m’a demandée. Sachant qu’elle était mourante, elle m’a proposé d’acheter la nourriture que les gens mangeraient le jour de sa mort. Cette femme est morte dans mes bras. Elle m’a tendu le bras en regardant vers le haut et m’a dit : « Je t’attends là-haut. » 

L’autre expérience est celle de la rencontre d’une femme marocaine abandonnée par son mari. Je l’ai accompagnée dans sa situation d’abandon. Grâce à elle, j’ai pu apprendre l’arabe. 

La difficulté rencontrée était la chaleur d’El Goléa, qui était très déshydratante et qui causait la mort chez beaucoup d’enfants. 

Victorine : Qu’est-ce qui te vient à l’esprit, quand tu penses à ton expérience de vie communautaire internationale et interculturelle ?

Gloria : Ce qui me vient à l’esprit quand je pense à mon expérience de vie communautaire, c’est la joie et   l’action de grâce en relisant ma vie et ma mission. J’ai exprimé ma joie comme un petit grain de sable, en échange des multiples dons du Seigneur, à l’Humanité, à mes sœurs, à la communauté, en vivant l’internationalité et l’ouverture à l’universel.

Victorine : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, encore à l’étape des vœux temporaires ? 

Gloria : Ce que je voudrais vous dire à vous, jeunes SMNDA, c’est la parole de Jésus : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés» et la parole aussi de Mère Marie-Salomé : « S’aimer et s’entraider» Le commandement de l’amour est un défi de chaque jour comme nous le demande Jésus. 
                            
                                                  
 Interviewée par Sr Victorine Bulangalire Mweze                                                                                                           Nouakchott, Mauritanie 

SR ADORATION BOLIVAR CASTRO (LOGROÑO, ESPAGNE)

SR ADORATION BOLIVAR CASTRO
LOGROÑO, ESPAGNE


Victorine : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux où tu as été envoyée ?           

Adoration : J’ai commencé ma mission au Burkina Faso où j’allais à la périphérie chaque samedi et dimanche pour visiter certaines familles, y compris les lépreux, à qui je faisais les pansements. A Bobo-Dioulasso, j’ai appris la langue senoufo qui m’a permis de donner les cours d’alphabétisation aux femmes. A cette période, la langue senoufo n’était pas encore écrite. Dans ma mission d’enseignement au collège de Tounouma au Burkina Faso ainsi qu’au Mali, mon désir était de former des personnes de haut niveau, capables de se situer dans un groupe social ou de poursuivre leurs études ailleurs. Au Mali, j’ai appris le bambara, et cela m’a donné la possibilité de travailler dans un projet. 
En Tunisie, chaque dimanche avec un Père Blanc, nous organisions une rencontre des jeunes étudiants subsahariens. Je visitais aussi le quartier le plus favorisé. 
En Mauritanie, j’étais proche de la population, je visitais les familles qui m’invitaient parfois à prendre un thé avec eux ; j’étais très contente de leur accueil. J’apprenais le cours d’espagnol aux étudiants. A travers cette expérience d’enseignement, j’ai accueilli dans ma famille, une fille mauritanienne qui avait le désir de poursuivre ses études en Espagne pour bien améliorer son niveau de la langue espagnole. Ma famille en est très reconnaissante encore aujourd’hui. En travaillant avec les handicapés, j’ai contribué à la promotion d’une jeune fille handicapée dans sa démarche pour participer à un concours des jeux olympiques à Londres. J’ai travaillé aussi en collaboration avec une ONG. Par ma mission, j’ai témoigné du « tout à tous » en étant une femme apôtre qui concrétise l’amour de Dieu envers toute personne sans distinction de race ni de tribu.

Victorine : De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ? Peux-tu l’expliquer ?

Adoration : L’action prophétique dont je me souviens s’est réalisée lors d’un coup d’État au Mali. Nous avons vécu cette situation avec le peuple en marchant tous ensemble dans un esprit d’encouragement et d’entraide.  Au Burkina Faso, je me souviens d’un simple geste que j’ai fait de ramasser la marchandise d’une femme qui est tombée de son vélo ; elle est venue à la communauté pour exprimer sa reconnaissance. En Mauritanie et en Tunisie, je me souviens de ma joie de visiter les familles et de m’asseoir avec eux pour le partage fraternel d’un thé, surtout pendant les fêtes musulmanes. 

Victorine : Qu’est-ce qui te vient à l’esprit, quand tu penses à ton expérience de vie communautaire internationale et interculturelle ?

Adoration : Mon expérience dans une communauté internationale et interculturelle a été pour moi, une grande joie, une source d’enrichissement et d’évangélisation. Aujourd’hui, étant en communauté seulement avec des sœurs espagnoles, je vois qu’il me manque quelque chose ; c’est moins enrichissant que de vivre dans une communauté internationale où on se complète mutuellement.

Victorine : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, encore à l’étape des vœux temporaires ? 

Adoration : Pour cette dernière réflexion, je vous dirais tout simplement de vivre chaque étape de votre formation de tout votre cœur, en profitant de toutes les invitations de l’Esprit Saint pour mieux comprendre notre charisme qui est merveilleux et si important !


Interviewée par Sr Victorine Bulangalire Mweze
Nouakchott, Mauritanie 

SR HUGUETTE REGENNASS (SCEAUX FILMINS, FRANCE)

SR HUGUETTE REGENNASS
SCEAUX FILMINS, France


Sr Victorine Bulangalire Mweze : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux où tu as été envoyée ?   
                                             
Sr Huguette : Il y a aujourd’hui 45 ans que je suis SMNDA, et durant tout ce temps de ma vie religieuse missionnaire, j’ai été envoyée dans plusieurs pays, mais principalement au Mali, dans trois milieux bien particuliers. 

Tout d’abord en 1973, à Ségou, où j’avais pour mission de m’occuper d’un jardin d’enfants, déjà existant, mais très pauvre quant à son installation. Deux jeunes monitrices maliennes avaient chacune une classe en charge, et moi j’étais là, d’une part pour veiller à la bonne marche de cette petite école, mais aussi pour aider et former les deux enseignantes qui n’avaient pas de diplômes.

En fait, ces deux années ont été pour moi un temps de découverte et de mise en pratique de tout ce que j’avais appris durant ma formation, sur ce que veut dire « être femme apôtre ». Dès le début, mes relations avec les monitrices furent simples et confiantes. Un grand respect de part et d’autre a fait que rapidement nous avons pu aborder des questions non seulement pédagogiques, mais aussi religieuses. 

C’est aussi avec les parents, que j’avais souvent l’occasion de rencontrer, que mon rôle de « femme apôtre » pouvait s’exprimer plus concrètement. Ils entendaient et voyaient notre attitude vis-à-vis de leurs enfants, et pour eux, notre témoignage était parlant.

Après ce temps de mission à Ségou, un temps me fut donné pour l’apprentissage du bambara à Falajè. En 1977, je rejoignais Kolokani, petit village de brousse, dit de « première évangélisation ». Après l’arrivée des sœurs dans cette région, un jardin d’enfants avait été construit, et deux monitrices déjà expérimentées y travaillaient. Mon rôle de directrice se résumait aux mêmes activités que j’avais à Ségou. La différence se situait surtout au niveau des parents, qui étaient peu motivés pour envoyer leurs enfants, si petits, à l’école ! Reste que nos relations ont toujours été très cordiales et ouvertes.

Durant 3 années, j’ai donc travaillé dans ce milieu bien spécifique des enfants. Puis des circonstances extérieures, ont fait que ma mission allait désormais s’orienter vers la pastorale en brousse. Je crois pouvoir dire que j’ai trouvé là, la plénitude de ma vocation, en annonçant la Bonne Nouvelle de l’Évangile, en réponse aux appels d’un nombre grandissant d’Africains qui ne connaissent pas Dieu. 

Tout se faisait bien sûr, en collaboration avec une communauté de prêtres de la paroisse, des Missionnaires d’Afrique. Je partais plusieurs jours dans ces villages, accompagnée d’un père ou d’une sœur, pour partager l’existence de ces gens, vivant de façon extrêmement pauvre (sans eau, sans électricité, avec très peu d’hygiène), pour leur apporter le message chrétien, sans oublier notre rôle très important, auprès des femmes (santé, nutrition, couture…) C’est peut-être là, à travers cette mission de première évangélisation que j’ai vécu en profondeur ma vocation de « femme apôtre ». Le peu que je pouvais apporter, avec mes limites, mes fragilités… allait – par la grâce de Dieu - porter du fruit…

La 3e communauté du Mali où j’ai vécu plusieurs années fut celle de Bamako, mais je vais en parler dans la question suivante.
             
Victorine : De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ? Peux-tu l’expliquer ?

Huguette :Un événement prophétique qui m’a beaucoup marquée se situe au moment où je vivais dans une communauté de Bamako. En plus de l’accompagnement de deux jeunes SMNDA qui faisaient leur stage apostolique, j’avais voulu entreprendre une activité, correspondant à la fois à un désir et à un besoin de la population. C’est alors que j’entrepris de commencer un « mini » jardin d’enfants, pour les enfants des lépreux déjà guéris, qui étaient regroupés dans un petit village à la périphérie de Bamako.

Les débuts ont été un peu difficiles, certes, car je n’avais rien d’autre que ma bonne volonté, l’accord de mes responsables et le soutien de ma communauté. Pourtant, après quelques démarches et rencontres, avec des personnes connues, j’obtins une grande salle, qu’on me prêtait pour faire cette activité. Puis, par le biais de ma communauté, une jeune femme se présenta pour venir m’aider bénévolement. Il ne manquait plus qu’un « brin » de matériel pédagogique, que j’obtins rapidement grâce à la l’ingéniosité et à la solidarité de mes sœurs et d’autres amis. Des bancs ? Nous n’en n’avions pas ! Qu’à cela ne tienne ! Le sol était cimenté, donc aucun problème pour s’asseoir par terre !

Le 1erjour, 6 enfants étaient là pour inaugurer la « nouvelle école » ! Quelques jours plus tard, ils étaient 10, et très vite je dus limiter les entrées, pour garder dans la classe une atmosphère de calme et de sérénité ! Ce serait trop long de raconter comment d’année en année, cette petite graine est devenue un « vrai » jardin d’enfants, avec 2 monitrices et un directeur malien avec lequel je corresponds toujours !

Activité prophétique ? Oui, certainement !

Victorine : Qu’est-ce qui te vient à l’esprit, quand tu penses à ton expérience de vie communautaire internationale et interculturelle ? 

Huguette : Ce qui me vient spontanément à l’esprit, c’est cette parole de Mère Marie-Salomé : « Aimez-vous comme des sœurs. » Je pense aussi à cette grande richesse que nous apporte une vie communautaire internationale et interculturelle. Les échanges entre les différentes cultures ne peuvent que nous aider à grandir et à nous ouvrir toujours davantage à l’autre.
                    
Victorine : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique, encore à l’étape des vœux temporaires ? 

Huguette : Ce que j’aimerais vous dire, à vous jeunes SMNDA, encore à l’étape des vœux temporaires, c’est d’abord et avant tout : aimez ! Mais comment faire pour aimer ?

Pour moi, il y a certaines attitudes qui sont incontournables : 

Tout d’abord « l’humilité ». Jésus ne nous a-t-il pas dit : « Si vous ne devenez comme des petits enfants, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux. »

L’enfant est aussi celui qui se sait aimé de son Père et qui, instinctivement, attend tout de lui. Autrement dit, il lui fait confiance, il s’abandonne… Quels que soient les difficultés, les soucis, toujours faire confiance. 

Une autre chose qui est aussi prioritaire, c’est la prière. La prière pour nourrir notre vie spirituelle, pour dire au Seigneur combien nous l’aimons, pour l’appeler au secours, lui demander pardon… 

Enfin, ce qui est pour moi aussi une attitude indispensable pour vivre notre vie religieuse missionnaire, c’est de toujours chercher la volonté de Dieu et de l’accomplir, même si elle ne correspond pas à « notre » volonté.


Interviewée par Sr Victorine Bulangalire Mweze
Nouakchott, Mauritanie 

Wednesday, June 6, 2018

SR. ANNA-BRIGITTA (MWANZA, TANZANIA)

SR. ANNA-BRIGITTA
 (MWANZA, TANZANIA)

As a MSOLA, how have you been a “woman apostle” in the different places where you have been? 

I am Anna Brigitta; I am Dutch actually in the community of Mwanza. I worked as a teacher for 20 years in the interreligious secondary school for boys and girls (Hindu, Christians, Muslims). I also worked in social welfare for 8 years. I taught in a diocesan girls’ secondary school (only Catholic) for 14 years. 

Today, I am coordinating the teachers at the catechist centre giving to the catechists’ wives one year courses in home sciences: food, nutrition, tailoring and child care. I am also collaborating with the Missionaries of Africa (M. Afr) and teachers to give a professional training to girls who are orphans or from very poor families and have no future.  I am assisting in the needs of food and safe water for the lepers who are rejected.

I have been a woman apostle in various places by sharing my life and teaching girls and women, giving them knowledge and skills to make them confident in their own life and become self-reliant as women. Very often they are abandoned by their husband and left alone to care for their children.

As a cookery teacher, I adapted my recipes to the reality of the people by using the materiel, food and local things they have, to give variety to their diet and improve the food value and cooking methods. For example: variety in the maize, cassava and sweet potato dishes.

Was there any prophetic action you remember particularly? Could you explain it? 

The prophetic action that I remember is that I gave hope to young people affected by the reality of their parents with AIDS.  The parents died and the grandparents were not able to educate them.  I gave them a chance to study. Some have finished higher education; others have professional training and can care for themselves. I stood by them; I spoke out for them; I fought for justice for them. They were rejected by their surrounding communities. Some of them were intelligent at school, so the teachers cheated them and I claimed for justice.

I remember one boy whose mother died from AIDS. He was 4 years old, he was so affected he couldn’t speak for 4 months after his mother’s death. I took him to nursery school and gave him love. Today he is a student in secondary school.

When you think of your experience of living in international and intercultural communities, what comes to you? Some words, an image, joys, challenges… 

International and intercultural communities enrich us in many ways. Because we have different languages and cultures, that is a richness we share.

An image that I can give to our international and intercultural communities is a bouquet of flowers. Big and small, different colours, arranged in the right way it becomes beautiful. All together as a beautiful community that is our international and intercultural community life.

We have a lot of joy together; we learn from one another. (dance, food, words…) the experience and richness of each culture give a lot of joy, understanding and knowledge.

We are the younger MSOLA generation, still in the stage of temporary vows: what would you like to say to us?

I would say work hard to get your certificate in faith and be rooted in Christ.


Interviewed by Sr. Odile Tuo Songuimangnon 

Nairobi, Kenya

SR GLORIA SEDES ALVAREZ (DELI, TCHAD)

SR GLORIA SEDES ALVAREZ
DELI, TCHAD

Sr Alicja Toton : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux ou tu as été envoyée ? De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ?

Gloria : Je me sens comme une femme disciple bien-aimée qui essaie de suivre Jésus chaque jour. Je repense à ma première nomination dans un pays en guerre… et aux nombreuses années de la guerre au Tchad. J’étais dans la première PMI à Ndogindi où j’ai passé plus d’heures à genoux devant un petit enfant atteint de tétanos ou devant le frigo à pétrole en panne … que devant le Saint- Sacrement. Mais je ne doute pas que Jésus était dans cette petite boite où il y avait ce petit souffrant ou dans ce crasseux frigo qui gardait nos médicaments pour les gens.

Nous faisions des plans, des prévisions comme si rien n’était, mais nous devions les changer souvent. Maintes fois nous avons défié la mort, mais nous avons crié : « LA VIE MALGRÉ TOUT ! »

Dans notre exil à Moundou, nous osions parcourir les routes pleines de bandits pour retourner à notre village et ravitailler en médicaments les accoucheuses et les animateurs de santé des villages. Nous avons défié l’impuissance et l’inertie d’être recluses dans un centre d’accueil en nous mettant en communauté pour étudier le ngambaye nous mettant ensemble pour élaborer les livrets de formation pour les agents de santé communautaires. Une sœur apportait son français facile, j’apportais ma capacité de dessiner.

Au retour de l’exil, nous avons ouvert la communauté de DELI. Je me suis investie dans la formation de 35 femmes comme accoucheuses rurales en parcourant les villages de notre paroisse, en formant les monitrices qui deviendraient des formatrices.       
                                                          
Nous avons défié les routes encore dangereuses et parfois très mauvaises, nous avons comblé la grande soif d’apprendre de ces gens du fond de la campagne. 
                                                                                         
Je vois ces femmes portant le bébé au dos ou dans le ventre faire 80 km à pied avec marmite, fagot et provisions sur la tête pour venir à la formation ; elles étaient joyeuses d’apprendre.

Nous nous sommes investies dans la transformation du CSS de Deli (un service public fonctionnant mal) en CSS du Belacd (du diocèse). Le défi a été de faire face à la nuque raide de la population de Deli, les plus nantis et les moins reconnaissants. Le comité de santé voulait être « le propriétaire » pour pouvoir se servir pour lui-même, mais nous avons souffert pour donner des soins à tous ces gens qui venaient frapper notre porte jour et nuit.

Dans toutes ses années au Tchad, je n’ai été que dans deux communautés différentes, mais je réalise que j’ai souvent changé d’activité en trouvant des nouveaux combats et défis.

Et mon plus grand défi à mon âge mûr comme missionnaire a été la création du Kapokier Rouge. Ce fut un appel à être proche des PVVIH, à offrir à une quinzaine de personnes une thérapie occupationnelle, à soigner presque 200 PVVIH avec une médecine douce telle que l’arqromerthérapie, à accueillir ces multitudes venant de partout.

Nous avons créé un Centre avec les moyens du bord et puisé presque tous les produits de la flore du pays. Nous avons pu former et travailler encore avec des gens du village, capables de devenir des thérapeutes ! C’était pour nous vivre pour les plus pauvres en périphérie proclamant en actes l’amour de la nature et de la mère terre, sans aucune sécurité pour l’avenir, pour crier : L’ESPÉRANCE MALGRÉ TOUT !

Sr Alicja Toton : Quand tu penses à ton expérience de vie en communautés internationales, interculturelles, qu’est ce qui te vient à l’esprit ?

Gloria : J’ai choisi une congrégation internationale. Toujours, cela m’a semblé une richesse et une plus grande ouverture au monde. 
Quant aux difficultés rencontrées dans ma vie dans les relations interpersonnelles, je crois qu’elles ont été davantage en lien avec les différents caractères qu’avec l’âge ou le pays d’origine.

Durant mes années de vœux temporaires, j’ai vécu dans une communauté à 4, et plus longtemps à 3 sœurs (Canada, France, Espagne). C’est beaucoup plus tard que la communauté a été internationale, intercontinentale et interraciale. 

Ma vie s’est passée presque toujours au Tchad ! J’ai eu l’occasion d’aller au Mexique durant deux ans. Là, j’ai été dans une communauté avec une Espagnole, une Italienne, une Burundaise et 4 Mexicaines, mais j’avais déjà presque 50 ans.

Ce sont ces dernières années que j’ai eu la joie de partager ma vie avec des sœurs du Burundi, du Mali et du Congo.

Sr Alicja Toton : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes SMNDA, encore à l’étape de vœux temporaires ?

Gloria : Que dire à mes jeunes sœurs bien aimées ? Du courage mes sœurs ! ÇA VAUT LA PEINE ! Soyez aimantes et vraies, soyez vous-mêmes, le Seigneur qui vous aime, saura vous conduire !


 Interviewée par Sr Alicja Toton 

Deli, Tchad