Wednesday, June 6, 2018

SR GLORIA SEDES ALVAREZ (DELI, TCHAD)

SR GLORIA SEDES ALVAREZ
DELI, TCHAD

Sr Alicja Toton : En tant que SMNDA, comment as-tu été une « femme apôtre » dans les différents lieux ou tu as été envoyée ? De quelle action prophétique te souviens-tu plus particulièrement ?

Gloria : Je me sens comme une femme disciple bien-aimée qui essaie de suivre Jésus chaque jour. Je repense à ma première nomination dans un pays en guerre… et aux nombreuses années de la guerre au Tchad. J’étais dans la première PMI à Ndogindi où j’ai passé plus d’heures à genoux devant un petit enfant atteint de tétanos ou devant le frigo à pétrole en panne … que devant le Saint- Sacrement. Mais je ne doute pas que Jésus était dans cette petite boite où il y avait ce petit souffrant ou dans ce crasseux frigo qui gardait nos médicaments pour les gens.

Nous faisions des plans, des prévisions comme si rien n’était, mais nous devions les changer souvent. Maintes fois nous avons défié la mort, mais nous avons crié : « LA VIE MALGRÉ TOUT ! »

Dans notre exil à Moundou, nous osions parcourir les routes pleines de bandits pour retourner à notre village et ravitailler en médicaments les accoucheuses et les animateurs de santé des villages. Nous avons défié l’impuissance et l’inertie d’être recluses dans un centre d’accueil en nous mettant en communauté pour étudier le ngambaye nous mettant ensemble pour élaborer les livrets de formation pour les agents de santé communautaires. Une sœur apportait son français facile, j’apportais ma capacité de dessiner.

Au retour de l’exil, nous avons ouvert la communauté de DELI. Je me suis investie dans la formation de 35 femmes comme accoucheuses rurales en parcourant les villages de notre paroisse, en formant les monitrices qui deviendraient des formatrices.       
                                                          
Nous avons défié les routes encore dangereuses et parfois très mauvaises, nous avons comblé la grande soif d’apprendre de ces gens du fond de la campagne. 
                                                                                         
Je vois ces femmes portant le bébé au dos ou dans le ventre faire 80 km à pied avec marmite, fagot et provisions sur la tête pour venir à la formation ; elles étaient joyeuses d’apprendre.

Nous nous sommes investies dans la transformation du CSS de Deli (un service public fonctionnant mal) en CSS du Belacd (du diocèse). Le défi a été de faire face à la nuque raide de la population de Deli, les plus nantis et les moins reconnaissants. Le comité de santé voulait être « le propriétaire » pour pouvoir se servir pour lui-même, mais nous avons souffert pour donner des soins à tous ces gens qui venaient frapper notre porte jour et nuit.

Dans toutes ses années au Tchad, je n’ai été que dans deux communautés différentes, mais je réalise que j’ai souvent changé d’activité en trouvant des nouveaux combats et défis.

Et mon plus grand défi à mon âge mûr comme missionnaire a été la création du Kapokier Rouge. Ce fut un appel à être proche des PVVIH, à offrir à une quinzaine de personnes une thérapie occupationnelle, à soigner presque 200 PVVIH avec une médecine douce telle que l’arqromerthérapie, à accueillir ces multitudes venant de partout.

Nous avons créé un Centre avec les moyens du bord et puisé presque tous les produits de la flore du pays. Nous avons pu former et travailler encore avec des gens du village, capables de devenir des thérapeutes ! C’était pour nous vivre pour les plus pauvres en périphérie proclamant en actes l’amour de la nature et de la mère terre, sans aucune sécurité pour l’avenir, pour crier : L’ESPÉRANCE MALGRÉ TOUT !

Sr Alicja Toton : Quand tu penses à ton expérience de vie en communautés internationales, interculturelles, qu’est ce qui te vient à l’esprit ?

Gloria : J’ai choisi une congrégation internationale. Toujours, cela m’a semblé une richesse et une plus grande ouverture au monde. 
Quant aux difficultés rencontrées dans ma vie dans les relations interpersonnelles, je crois qu’elles ont été davantage en lien avec les différents caractères qu’avec l’âge ou le pays d’origine.

Durant mes années de vœux temporaires, j’ai vécu dans une communauté à 4, et plus longtemps à 3 sœurs (Canada, France, Espagne). C’est beaucoup plus tard que la communauté a été internationale, intercontinentale et interraciale. 

Ma vie s’est passée presque toujours au Tchad ! J’ai eu l’occasion d’aller au Mexique durant deux ans. Là, j’ai été dans une communauté avec une Espagnole, une Italienne, une Burundaise et 4 Mexicaines, mais j’avais déjà presque 50 ans.

Ce sont ces dernières années que j’ai eu la joie de partager ma vie avec des sœurs du Burundi, du Mali et du Congo.

Sr Alicja Toton : Que voudrais-tu nous dire à nous, jeunes SMNDA, encore à l’étape de vœux temporaires ?

Gloria : Que dire à mes jeunes sœurs bien aimées ? Du courage mes sœurs ! ÇA VAUT LA PEINE ! Soyez aimantes et vraies, soyez vous-mêmes, le Seigneur qui vous aime, saura vous conduire !


 Interviewée par Sr Alicja Toton 

Deli, Tchad

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